Alors que les boutiques sont envahies de bagues connectés et autres matelas bourrés de capteurs, les nuits sont-elles meilleures grâce aux nouvelles technologies ? Une étude de Philippe Cabon, enseignant-chercheur à l'université Paris Cité, psychologue de formation pour la Fondation Maif, nous dit que pas vraiment.
Selon l’expert, les personnes qui utilisent ces gadgets dorment beaucoup moins bien que celles qui s’en passent. Rappelons qu’en un demi-siècle, les Français ont perdu une heure et demie de sommeil selon le ministère de la Santé, et ces outils pensés pour inverser la tendance aggravent souvent le problème.
L’équipe de Philippe Cabon a suivi deux groupes de volontaires pendant un mois. Le premier utilisait des appareils connectés, l’autre non. Les résultats ont même surpris les chercheurs qui s’attendaient à une amélioration de la qualité du sommeil chez les utilisateurs de nouvelles technologies.
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Est-ce que les objets connectés améliorent vraiment le sommeil ?
Mais c’est l’inverse qui s’est produit. « On s’est rendu compte que le fait d’utiliser ces objets générait une forme d’anxiété », explique le chercheur à France Info. « C’est ce qu’on appelle une anxiété de performance du sommeil, puisque, comme vous savez que vous êtes monitoré, si vous voyez, par exemple, que votre score de sommeil diminue d’une nuit à l’autre, ça a tendance à générer du stress, ce qui dégrade la qualité du sommeil. »
Cette obsession pour un score de sommeil parfait a un nom : l’orthosomnie. Un terme qui a vu le jour en 2017 dans une étude publiée dans le Journal of Clinical Sleep Medicine. On le doit à la psychologue clinicienne Kelly Glazer Baron de l’université de l’Utah.
L’orthosomnie désigne une fixation malsaine sur la qualité du sommeil. Les personnes touchées vérifient leurs données dès le réveil de manière compulsive, s’inquiètent de scores insuffisants et aggravent même leurs troubles au lieu de les résoudre. Certains passent même plus de temps au lit dans l’espoir que les statistiques soient au vert. Paradoxalement, cette tendance allonge le temps d’endormissement et fragmente le sommeil.
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Les données fournies par ces appareils connectés posent aussi un problème de fiabilité. « Les données que montres, bagues et autres matelas connectés transmettent sont relativement peu précises », souligne Philippe Cabon. Selon lui, très peu d’objets sont scientifiquement validés.
Une recherche publiée dans le Journal of Sleep Research explique que les bracelets connectés mesurent bien la durée du sommeil mais n’évaluent pas correctement sa qualité. Les algorithmes qui déterminent les phases de sommeil léger, profond ou paradoxal sont approximatifs.
Pour une mesure précise, il faudrait des capteurs physiologiques qui analysent les ondes cérébrales, les mouvements oculaires, la fréquence cardiaque et la respiration.
En général, les produits grand public se contentent d’un seul capteur. Les chercheurs sont donc catégoriques : « Des bénéfices que certains constructeurs promettent aux utilisateurs n’ont jamais été démontrés » .
Si vous dormez mal, allez chez le médecin
Les chercheurs précisent que ces produits « ne peuvent en aucun cas remplacer un suivi par un médecin du sommeil qui, lui, va utiliser des méthodes beaucoup plus invasives comme des électrodes pour poser un diagnostic. » Alors si vous avez un sérieux trouble du sommeil, il faut consulter un médecin puisqu’une application sur smartphone n’est pas conçue pour résoudre les problèmes de santé.
Mais alors pourquoi le sommeil des Français se dégrade ? L’exposition aux écrans avant de se coucher est l’un des coupables. La lumière bleue des smartphones et tablettes perturbe la sécrétion de mélatonine et retarde l’endormissement. Les 18-24 ans se couchent en moyenne à 23h43 en semaine et mettent presque une heure à s’endormir. Une génération connectée qui est bien plus touchée par l’orthosomnie.
Philippe Cabon reconnaît toutefois une utilité aux objets connectés qui aident « à la prise de conscience de la dette de sommeil ». Ces produits permettent également « une première estimation sur la régularité du sommeil et sa durée moyenne même si elle n’est pas précise à 100 % ».
Pour les chercheurs, surveiller son sommeil s’inscrit dans la même tendance que compter ses pas ou ses calories. « On a une forme d’injonction à surveiller son état de santé en général », affirme Philippe Cabon.
« Sauf que la manière dont c’est fait n’est pas accompagnée, les gens sont bombardés de chiffres, de scores, de pourcentages. Mais il n’y a aucune éducation sur la compréhension de ces données et surtout sur ce qu’on doit mettre en place, ensuite, pour améliorer, notamment, la qualité de son sommeil » précise l’étude.
L’équipe de Philippe Cabon a créé une application gratuite appelée Sleeptips, testée auprès de 62 personnes pendant plusieurs mois. Cette application ne donne pas de scores anxiogènes. On trouve des conseils personnalisés basés sur des questionnaires scientifiques. L’objectif est de faire prendre conscience de ses habitudes de sommeil et des facteurs qui les influencent. Les chercheurs souhaitent éviter au maximum que chaque nuit soit une compétition.
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L’IA pourrait améliorer la précision de ces appareils connectés avec de nouveaux capteurs et algorithmes, « pour une interprétation beaucoup plus précise du sommeil », estime Philippe Cabon. Mais le chercheur s’interroge : « Ce qui compte finalement, n’est-ce pas ce qu’on fait de ces informations plutôt que la précision de ces informations ? »
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Comment améliorer naturellement la qualité de son sommeil ?
Pour vraiment améliorer la qualité de votre sommeil, le chercheur rappelle les principes de base qui n’ont pas besoin de nouvelles technologies : « Respecter la régularité des horaires de coucher, la qualité de sommeil pour s’assurer de rembourser régulièrement sa dette de sommeil. Ne pas utiliser son smartphone 1h30 à 2h avant d’aller dormir et tout ce qui contribue au lâcher-prise car le sommeil est très sensible aux ruminations. »
Une sieste courte d’une durée maximale de 15 minutes est préférable à une grasse matinée pour récupérer. Pourquoi ? Car elle ne dérègle pas l’horloge biologique. L’activité physique régulière améliore aussi le sommeil. Mais ne le faites pas 2h avant de vous coucher.
Source : France Info
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