Compteur Linky : un bilan mi-figue mi-raisin

Le compteur Linky a été à la source de nombreux combats, de nombreux débats, de nombreux mouvements contestataires depuis sa généralisation en 2016. Suite à un premier rapport publié en 2018, la Cour des Comptes fait un nouveau bilan 6 ans plus tard sur le fameux compteur électrique, sur son déploiement et son utilisation. Ce document a été rendu public fin novembre et relayé par l’UFC Que Choisir.
Que faut-il en retenir ?

Un succès pour ce programme industriel

Le déploiement de masse des compteurs communicants Linky a été réalisé dans les délais et son coût est inférieur aux prévisions initiales, “faisant de ce programme industriel un succès reconnu par la plupart des acteurs“, indique la Cour des Comptes. Il est estimé à 4,6 milliards d’euros. La qualité de service attendue est globalement au rendez-vous. Mais des difficultés persistent, notamment sur les systèmes d’information et la maîtrise de leur coût.

Les Sages de la rue Cambon rappellent que ce déploiement général du compteur n’a pas été de tout repos. Il a généré des “oppositions fondées” sur les risques d’exposition aux ondes électromagnétiques, et sur la protection des données individuelles. Les suspicions ont été depuis globalement levées.

La Cour rappelle également que l’objectif principal était l’amélioration du fonctionnement du marché de détail de l’électricité et la maîtrise de la demande d’énergie. Cela devait se traduire pour les consommateurs par un meilleur service de relèvement des consommations, des simplifications pour les raccordements (autoconsommation individuelle par exemple) et, au final par une baisse du montant des factures.

Une baisse de la facture

La Cour constate que certains gains d’efficacité bénéficient d’ores et déjà aux distributeurs d’électricité, aux fournisseurs et aux consommateurs. Une part de ces gains a été rétrocédée aux consommateurs à travers la baisse du coût de certaines prestations. L’installation des compteurs communicants a également des effets positifs sur le fonctionnement du réseau de distribution et sur l’adaptation de sa gestion. Linky contribue également à la stabilité du réseau électrique en participant à l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité lors de périodes de tension.

Un bilan décevant

Pour autant, la Cour des Comptes dresse un bilan provisoire encore décevant en ce qui concerne la maîtrise de la demande d’énergie et le volet commercial. Les gains d’efficacité ne sont pas au rendez-vous des prévisions initiales relève-t-elle.

C’est notamment le cas pour la maîtrise de la demande d’énergie (MDE) à travers l’information du consommateur sur le détail de sa consommation ou la modulation tarifaire horaire afin de l’inciter à décaler sa consommation hors pointe pour réduire sa facture d’électricité.

Les innovations commerciales ne sont pas non plus au rendez-vous. Les fournisseurs d’électricité n’ont pas encore profité de cette innovation pour proposer à leurs clients des offres tarifaires plus attractives et plus poussées que les classiques heures pleines heures creuses et formule Tempo.

L’amélioration du fonctionnement du marché de l’électricité, qui constitue la dimension européenne du projet, n’est pas non plus perceptible.

La fraude n’a pas reculé

Last but not least, la fraude n’a pas reculé avec Linky. “L’augmentation de la fraude a été observée, à partir de mi-2023 dans plusieurs pays d’Europe, probablement en lien avec la hausse significative des prix de l’énergie. En 2023, Enedis a évalué son coût à 275 millions d’euros (225 millions d’euros d’achat d’énergie et 50 millions d’euros d’acheminement non facturé)”.

Globalement, la Cour estime que les nouveaux services apportés aux consommateurs par les fournisseurs restent décevants. “Les offres commerciales innovantes se heurtent à la préférence des consommateurs pour des prix fixes ou prévisibles comme le sont
les tarifs réglementés“.