Liquidation de Brandt : le gouvernement n’a pas dit son dernier mot

Par Pierre-Jean Alzieu

Publié le 12/12/2025 à 15:07

Coup de tonnerre pour l’industrie française : Brandt, dernier fabricant de gros électroménager en France, est officiellement placé en liquidation judiciaire. Le tribunal de Nanterre n’a retenu aucun projet de reprise, y compris l’ambitieux plan de Scop soutenu par l’État et les collectivités. Près de 700 salariés se retrouvent brutalement sans solution, quelques jours avant Noël.

Groupe Brandt
Groupe Brandt

Mise à jour du vendredi 12 décembre 2025 : ajout des déclarations du gouvernement.

Le ministre délégué à l’Industrie, Sébastien Martin, a déclaré vendredi 12 décembre qu’il « ne laisse pas tomber » Brandt, et estime qu’il est possible « d’imaginer un nouveau projet industriel ». « Il y a un site industriel qui est présent, il y a des savoir-faire qui sont présents et donc la capacité d’imaginer un nouveau projet industriel sur ce site », a-t-il ajouté en donnant rendez-vous aux acteurs locaux d’ici la fin du mois.

Neuf jours après s’être dit prêt à investir 5 millions d’euros pour sauver Brandt, l’État assistait pourtant impuissant à l’effondrement d’un fleuron centenaire. Le tribunal des activités économiques de Nanterre a effectivement prononcé jeudi la liquidation judiciaire du groupe Brandt, mettant un terme à plus d’un siècle d’histoire industrielle.

Cette décision entraîne la suppression d’environ 700 emplois, et scelle la disparition de quatre marques historiques de l’électroménager français : Brandt, Vedette, Sauter et De Dietrich. Le ministre de l’Industrie a indiqué que le plan social ne serait pas forcément remis en cause, et que les salariés seraient accompagnés.

« Je suis prudent, mais il reste encore une possibilité après la liquidation judiciaire », a pour sa part déclaré Serge Papin, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat, du tourisme et du pouvoir d’achat, sur Europe 1. « Les banques qui font défaut actuellement, (…) en voyant le sérieux et la robustesse d’un projet alternatif, pourraient peut-être s’engager », a-t-il ajouté.

Un choc industriel malgré une mobilisation inédite

L’annonce est tombée en milieu de matinée, relayée par François Bonneau, président de la région Centre-Val de Loire :

« C’est une terrible nouvelle, un choc et un coup très dur porté à l’industrie française. »

L’émotion est immense sur les deux sites français du groupe — Saint-Jean-de-la-Ruelle, près d’Orléans, et Vendôme, dans le Loir-et-Cher — où les salariés ont appris leur licenciement collectif. À Vendôme, plusieurs dizaines d’entre eux ont exprimé leur colère, entre braseros allumés et documents administratifs brûlés comme ultime geste symbolique.

Bercy a de son côté évoqué « une profonde tristesse » et « un fleuron français qui s’éteint ».

Le projet de Scop rejeté malgré le soutien de l’État

Le tribunal n’a retenu aucune offre de reprise, y compris le projet de Scop défendu par les salariés, soutenu par :

  • Le gouvernement
  • Les élus locaux
  • La métropole d’Orléans et la région Centre-Val de Loire
  • Le groupe Revive, impliqué depuis le début pour bâtir une solution pérenne

Ce dossier était pourtant la seule option permettant de sauver les deux usines françaises, et de préserver entre 295 et 370 emplois selon les versions présentées devant le tribunal.

Au total, près de 20 millions d’euros d’engagements publics avaient été réunis ces derniers jours, mais les juges ont estimé que les conditions de viabilité du projet n’étaient pas réunies — notamment du fait de l’absence de soutien bancaire, pourtant indispensable à la relance.

Un groupe en grande difficulté depuis plusieurs années

Placé en redressement judiciaire début octobre, Brandt traversait une crise profonde :

  • Un chiffre d’affaires 2025 de 260 M€, en baisse depuis deux ans
  • Un marché du gros électroménager en recul
  • Une trésorerie exsangue, incapable d’assurer les salaires au-delà du 15 décembre
  • Une production quasiment à l’arrêt
  • Des besoins estimés entre 20 et 25 millions d’euros pour relancer l’activité

Malgré l’optimisme initial affiché par son propriétaire, le groupe algérien Cevital, aucun repreneur privé n’a souhaité s’engager.

Une disparition lourde de conséquences

Avec cette liquidation, la France perd son dernier fabricant de gros électroménager. Les conséquences sont majeures :

  • 700 suppressions d’emplois immédiates
  • Fermeture des deux usines françaises
  • Disparition de quatre marques historiques connues de la majorité des ménages
  • Un coup dur pour la souveraineté industrielle du pays
  • La perte d’un savoir-faire dans la cuisson, les fours et l’induction

L’État s’est engagé à accompagner les salariés, mais aucun dispositif ne pourra compenser la disparition d’un groupe industriel emblématique fondé en 1924.

Et maintenant ?

Les prochains jours seront consacrés :

  • À l’organisation des départs des salariés
  • À la gestion des sites industriels
  • Aux procédures liées à la liquidation
  • À d’éventuelles discussions sur la reprise partielle d’actifs ou de marques

Mais une chose est certaine : Brandt ne produira plus d’électroménager en France.

Source : Ouest-france, Le Monde

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