Faute de budget voté pour 2026, le guichet de MaPrimeRénov’ sera de nouveau suspendu à compter du 1er janvier. Le ministre du Logement Vincent Jeanbrun a confirmé qu’une loi spéciale ne permettra pas de financer le dispositif. Après plusieurs arrêts en 2025, cette nouvelle suspension fragilise encore la rénovation énergétique, avec des milliers de dossiers en attente et une filière du bâtiment sous tension.

Suspension de MaPrimeRenov. Image générée par l'IA.
Suspension de MaPrimeRenov. Image générée par l’IA.

Le dispositif MaPrimeRénov’ sera de nouveau à l’arrêt à compter du 1er janvier 2026. Faute de budget voté pour l’an prochain, le gouvernement confirme effectivement la suspension du guichet d’aide à la rénovation énergétique, une décision aux lourdes conséquences pour les ménages comme pour l’ensemble de la filière du bâtiment.

« Pas de budget, pas de guichet »

Invité de l’émission Dimanche en politique sur France 3, le ministre du logement Vincent Jeanbrun n’a laissé planer aucun doute. « Je l’avais dit : pas de budget, pas de guichet », a-t-il martelé, confirmant que même l’adoption d’une loi spéciale ne permettrait pas de maintenir MaPrimeRénov’ ouverte en début d’année.

En cause : l’échec de la commission mixte paritaire à trouver un compromis sur le projet de loi de finances pour 2026. Sans budget voté par le Parlement, l’État ne peut engager de nouvelles dépenses non contractuelles, y compris pour financer les aides à la rénovation énergétique.

Une loi spéciale insuffisante

Le gouvernement s’oriente désormais vers une loi spéciale, un texte technique destiné à éviter un blocage total de l’action publique. Mais cette solution reste très limitée. « La loi spéciale, ce n’est pas un budget, c’est une rustine qui permet de ne pas tout bloquer, mais qui empêche toute nouvelle dépense », a résumé Vincent Jeanbrun.

Concrètement, l’État pourra continuer à percevoir les impôts existants et à financer les services jugés indispensables, mais sans possibilité de décaisser de nouveaux crédits pour MaPrimeRénov’. « Sans budget, on ne pourra pas décaisser l’argent », insiste le ministre, qui refuse d’ouvrir un guichet sans garantie de financement effectif.

Un dispositif déjà fragilisé en 2025

Cette suspension n’est pas une première. En 2025, MaPrimeRénov’ avait déjà connu un fonctionnement en pointillé : plusieurs semaines d’arrêt en début d’année, puis une suspension partielle durant l’été. Objectif affiché à l’époque : lutter contre les fraudes et reprendre le contrôle d’un dispositif victime de dérives.

Résultat, selon le ministère, plus de 80 000 dossiers sont actuellement en cours d’instruction. Tous les dossiers déposés en 2025 doivent être traités en 2026, mais l’absence de budget risque d’allonger encore les délais, dans un contexte déjà tendu pour les ménages engagés dans des travaux.

Le secteur du logement sous pression

Au-delà de MaPrimeRénov’, c’est l’ensemble de la politique du logement qui se retrouve fragilisée. D’autres mesures très attendues, comme le futur « statut du bailleur privé », destiné à encourager l’investissement locatif via des avantages fiscaux, pourraient également être gelées tant qu’un budget n’est pas adopté.

Pour le gouvernement, l’urgence est désormais politique autant qu’économique. « Il faut retrouver de la stabilité », plaide Vincent Jeanbrun, appelant à un vote rapide du budget 2026. En attendant, la suspension de MaPrimeRénov’ au 1er janvier laisse planer une nouvelle incertitude sur la trajectoire de la rénovation énergétique en France, pourtant centrale pour atteindre les objectifs climatiques et soutenir l’activité du bâtiment.

La Capeb plaide pour un plan pluriannuel sur cinq ans

Au lendemain de cette annonce, la Capeb (Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment) tire la sonnette d’alarme. Pour Jean-Christophe Repon, son président, cette nouvelle interruption constitue « un nouveau coup dur » pour un secteur déjà fragilisé. Représentant près de 61 000 artisans, la confédération alerte sur une lente décroissance de l’activité du bâtiment depuis deux ans, marquée par environ 40 000 suppressions d’emplois et un recul de l’activité estimé à –3,5 %.

Selon la Capeb, la suspension de MaPrimeRénov’ pourrait à elle seule entraîner une perte supplémentaire de 2 % d’activité. Son président appelle donc à changer de méthode : sortir d’une logique annuelle et construire un plan pluriannuel de rénovation énergétique sur cinq ans. Cela permettrait d’offrir enfin de la visibilité aux ménages comme aux professionnels.

Ce plan reposerait sur un double levier : la mobilisation des crédits publics de MaPrimeRénov’, mais aussi le recours à des financements privés. La Capeb évoque notamment les certificats d’économies d’énergie (CEE), basés sur le principe du pollueur-payeur, ainsi que des solutions de financement bancaire, comme un « leasing d’accompagnement à la rénovation ».

Sources : Le Monde, Le Figaro, Le Télégramme, BFM Business