Le producteur savoyard Bonneval réclame 1,6 milliard d'euros à Nestlé Waters et le retrait de marques phares (Perrier, Vittel). En cause : l'usage de traitements interdits pour des eaux dites « minérales naturelles ».
Bonneval Emergence, producteur savoyard d’eaux minérales naturelles, a assigné Nestlé Waters devant le tribunal des activités économiques de Nanterre. En cause : l’utilisation de traitements interdits sur des eaux commercialisées sous l’appellation « eau minérale naturelle ». La société réclame 1,6 milliard d’euros et le retrait du marché des marques Perrier, Vittel, Contrex et Hépar.
Une procédure inédite, révélée par Le Monde, qui marque un tournant dans le dossier explosif des eaux minérales en France.
Une offensive judiciaire sans précédent dans l’affaire des eaux filtrées
Fondée en 2017 et implantée à Séez (Savoie), Bonneval Emergence exploite plusieurs sources d’altitude, sans forage profond ni procédés de désinfection.
L’entreprise estime avoir subi un préjudice économique massif du fait du maintien sur le marché d’eaux Nestlé qu’elle juge non conformes à la réglementation.
Selon son PDG David Merle, les marques du groupe Nestlé auraient bénéficié indûment de l’appellation « eau minérale naturelle », alors que leurs eaux ont été :
- filtrées par charbon actif
- exposées à des UV
- microfiltrées à 0,2 micron, puis 0,45 micron
Des pratiques interdites par le Code de la santé publique et la réglementation européenne lorsqu’il s’agit d’eaux minérales naturelles.
« Eau minérale naturelle » : une définition strictement encadrée
La réglementation est claire : une eau minérale naturelle doit être pure à la source, protégée de toute pollution, sans aucun traitement de désinfection, et avec une composition minérale stable dans le temps.
Or, Nestlé Waters a reconnu avoir utilisé des procédés correctifs pendant plusieurs années pour faire face à des contaminations microbiologiques récurrentes, notamment sur le site de Vergèze (Gard), où est produite Perrier.
Ces révélations avaient déjà été évoquées dans notre dossier : Scandale Perrier : ce qu’il faut savoir sur la crise qui frappe l’eau minérale iconique
Une demande radicale : retrait du marché et rappel des bouteilles
Dans son assignation déposée le 15 octobre 2025, Bonneval Emergence demande :
- le retrait immédiat des eaux Perrier, Vittel, Contrex et Hépar
- le rappel de l’ensemble des bouteilles concernées
- une astreinte d’un million d’euros par jour de retard
- 1,6 milliard d’euros de réparation pour concurrence déloyale
- Une première audience est prévue le 27 janvier 2026.
Nestlé Waters, de son côté, conteste fermement les accusations et évoque des « motifs totalement infondés ».
Un enjeu économique… mais aussi patrimonial
Au-delà des montants, l’affaire pose une question centrale : l’appellation “eau minérale naturelle” est-elle en train de perdre son sens ?
Pour Bonneval, autoriser des filtrations à 0,45 micron reviendrait à changer les règles plutôt que les pratiques, au risque de banaliser un label historiquement protecteur pour le consommateur.
Le producteur savoyard affirme disposer de réserves d’eau suffisantes pour augmenter fortement sa production et estime qu’il aurait pu capter une part significative du marché laissé vacant si les eaux Nestlé avaient été retirées plus tôt.
Une crise qui dépasse Perrier et interroge les consommateurs
Cette action en justice s’inscrit dans un contexte plus large de défiance envers les industriels de l’eau en bouteille.
Contaminations, traitements non conformes, manque de transparence : la confiance des consommateurs est fragilisée.
Chez Labo Maison, cette affaire nous a conduits à élargir notre réflexion à la qualité de l’eau au robinet et aux solutions de filtration domestique, un sujet que nous suivons désormais de près.










